Plateforme Revendicative du 1er mai 2013.

Confédération Générale des Travailleurs de Mauritanie CGTM

Plateforme Revendicative du 1er mai 2013.

La persistance de la crise financière mondiale ne cesse d’avoir des conséquences catastrophiques sur les conditions de vie et de travail des millions de travailleurs et travailleuses de tous les continents. La Confédération syndicale internationale (CSI) et les Global Unions se mobilisent et s’engagent davantage pour le Travail Décent qui constitue l’alternative incontournable d’une bonne et meilleure reprise économique mondiale. La CGTM, à l’instar des toutes les organisations syndicales affiliées à la CSI, va célébrer, comme à l’accoutumée, la Fête internationale du Travail qui sera placée cette année sous le thème : Travail Décent pour tous les travailleurs et toutes les travailleuses. Il convient de rappeler que cette fête du travail intervient au niveau de notre pays, dans un contexte marqué par l’aggravation de la crise économique et sociale, dominée par la détérioration sans précédent du pouvoir d’achat des masses laborieuses et la détérioration de leurs conditions de vie et de travail. Le recours systématique au sous emploi au niveau des entreprises sous traitantes continue d’hypothéquer et de précariser les emplois de la très grande majorité des travailleurs et travailleuses des secteurs public, parapublic et privé. Les filets de sécurité sociale connaissent une courbe descendante, abandonnant des milliers de travailleurs sur les bords de la route, à la merci d’une pauvreté qui s’accentue largement au niveau des travailleurs et de leurs ménages. Les conventions internationales de travail de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et la législation nationale de travail connaissent des violations répétées et répétitives, tant au niveau entreprises nationales que multinationales. Pendant ce temps, l’Etat et le Patronat observent un refus obstiné d’ouvrir de véritables négociations sociales entre les partenaires sociaux autour des plates-formes revendicatives déposées à leur niveau régulièrement.

Dans les récentes revues économiques et monétaires de notre pays, le Fonds Monétaire International (FMI) a noté une croissance soutenue et un cadre macroéconomique propice, toutefois, force est de constater que les indicateurs sociaux n’ont pas été tenus en considération, car cette croissance n’est pas inclusive et la redistribution des richesses créées ne profite pas à la grande majorité des populations qui restent toujours dans la sphère des pauvres, avec un taux moyen de 50%.

Pourtant les richesses minières et pétrolières qui ont rendu cette croissance possible, sont laissées à la merci de sociétés multinationales qui les exploitent et les exportent sur la base de contrats de partage de production très défavorables à notre pays. La main d’œuvre mauritanienne utilisée dans les zones d’exploitation de ces richesses est abandonnée à la merci de sociétés sous -traitantes qui en font des esclaves modernes.Quant aux secteurs agricole et d’élevage,  qui ne participent paradoxalement au PIB qu’à hauteur de 2%, le gouvernement n’a promu aucune politique nationale basée sur la valorisation du potentiel agropastoral du pays, pour son expansion et son extension afin de lui conférer une place prioritaire dans le développement économique et social national.La présente plate-forme revendicative, en raison de l’urgence nécessité de trouver rapidement des solutions aux préoccupations qu’elle pose, exige l’ouverture immédiate des négociations autour des points suivants :

  1. 1.      Salaires

-     La revalorisation du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG), fixé actuellement à Trente mille (30.000) Ouguiya. Ce niveau de salaire minimal, non, seulement, n’est pas appliqué et étendu à tous les secteurs d’activités socioéconomiques, mais reste très en deçà du niveau du coût moyen de la vie dans notre pays. Le SMIG  doit être porté à Cent mille (100.000) Ouguiya pour tenir compte des besoins vitaux d’une famille moyenne ne dépassant pas 5 membres.

-     Une augmentation généralisée des salaires afin de permettre de donner au travail sa valeur décente qui assure aux travailleurs des conditions de vie et de travail épanouies (emplois bien rémunérés, logements décents, une bonne éducation des enfants, des soins accessibles et de bonne qualité, un cadre de vie harmonieux dans un environnement protecteur)

-     La suppression de l’Impôt sur les Traitements et Salaires (ITS) à travers une politique de défiscalisation des salaires par une refonte totale de l’assiette actuelle qui porte un lourd fardeau fiscal sur les moins riches que sont les travailleurs, pendant que l’Etat ne leur assure aucun besoin dans les services sociaux de base.

  1. 2.      Sécurité Sociale et Sanitaire

a)      Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) :

Cette institution de prévoyance sociale créée depuis 1967, doit être rénovée et ses prestations améliorées et renforcées afin d’assurer une protection sociale convenable et efficace à ses assurés. Il est nécessaire, à cet effet, de finaliser et de mettre en œuvre l’étude actuarielle du BIT. La position des travailleurs dans l’accumulation du capital de cette Institution doit leur conférer un droit de regard sur sa gestion à travers une représentation démocratique et règlementaire des travailleurs dans l’organe délibérant, qui reflète leur libre choix en tant qu’actionnaires.   

-   La revalorisation des prestations pour tenir compte du niveau de vie actuel

-     La création d’une branche assurance maladie au sein de la CNSS

-     L’introduction d’une branche Assurance Chômage pour couvrir les inégalités sociales et assurer une solidarité nationale.

 

b)      Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM) :

-     la Révision des dispositions et du mode de fonctionnement de la CNAM pour se rapprocher davantage des assurés et leur offrir des prestations de qualité et à moindre coût.

- La représentation des travailleurs au niveau de l’organe délibérant doit refléter le choix des travailleurs et non être imposée par la direction générale de la CNAM.

 

  1. 3.      La Formation Professionnelle

- Elaboration d’une politique pour la formation professionnelle dans le cadre d’une Stratégie Nationale de l’Emploi

- Revaloriser les curricula et les diplômes des centres de formation professionnelle pour les permettre d’offrir une insertion socioprofessionnelle immédiate.

 

  1. 4.      Dialogue Social et Respect des Normes Internationales de Travail :

 

-     Une culture de dialogue et de concertation entre tous les partenaires sociaux et ce depuis les entreprises doit se traduire par la Création d’un Cadre Permanent de Concertation.

- La promotion, l’application, et le respect des Conventions Internationales de Travail doivent être le socle de tous les rapports professionnels à travers une régulation sociale véritable des services de l’administration du travail.

- La ratification des Conventions de l’OIT n° 97 et 143 pour les travailleurs migrants

- La ratification de la Convention n° 189 de l’OIT sur les travailleuses/travailleurs domestiques.

  1. 5.      La législation du Travail

En vue de leur adaptation et de leur actualisation, la révision des textes législatifs et règlementaires de travail doit être faite dans les meilleurs délais:

-         Code du Travail

-     Statut Général de la Fonction Publique

-     L’adoption et l’application des statuts particuliers des fonctionnaires

-     Convention Collective Générale du Travail

            -   Convention de Travail Maritime et des Pêches

                        -Révision de la prime de transport

             -  Conventions sectorielles de tous secteurs d’activités socioprofessionnelles

              La conclusion des nouvelles conventions collectives du Travail pour codifier tous                         les nouveaux secteurs de production nationale

                        -   Statut Général des Travailleurs des collectivités locales

  1. 6.      Logement

-     Elaboration d’une politique de logements sociaux pour les travailleurs

  1. 7.      Gestion des entreprises publiques

-     Implication des travailleurs dans la gestion des entreprises publiques à travers leur désignation au niveau des conseils d’administration, la concertation avec les délégués du personnel et les membres des comités consultatifs d’entreprise.

  1. 8.      Sous-traitance

-     L’application et la mise en œuvre de la nouvelle politique prônée par l’Etat concernant la sous-traitance.

-  Arrêt immédiat de la location de la main d’œuvre et de l’esclavage moderne qui sont devenus monnaie courante

- Respect des dispositions contenues dans les protocoles d’accord convenus entre la SNIM et les travailleurs de la sous-traitance.

  1. 9.      Emploi

-  Elaboration et Mise en place d’une Stratégie Nationale de l’Emploi.

-  Révision des textes régissant l’emploi avec une implication effective des travailleurs

-  Eliminer les emplois non permanents et temporaires et régulariser les travailleurs dans leurs droits

- Promouvoir des emplois rémunérés dans l’agriculture et l’élevage pour lutter efficacement contre les séquelles de l’esclavage.

       10. Chômage

 

    Le taux de chômage officiellement déclaré à 31,2% est très en deçà de la réalité et pourrait approcher les 40% voir plus, tant le marché de l’emploi n’arrive pas à absorber les nombreux actifs qui y arrivent annuellement. Cette population de chômeurs, constituée majoritairement de jeunes et de femmes, n’arrive même pas à accéder aux informations sur leur employabilité.

Nous exigeons ;

-         Une insertion rapide de tous les jeunes dans le tissu économique national à travers la promotion de projets porteurs tant dans les villes que dans les campagnes.

-         Une opportunité d’emplois aux femmes qui ont démontré leur compétences à travers des appuis conséquents à la création de leurs propres entreprises.

-         Une égalité de chances à tous les fils et à toutes les filles de la Nation face aux emplois créés.

-         L’implantation des bureaux de placement publics et privés pour assurer la transparence dans la gestion des offres d’emploi.

 

  1. 10.              Travailleurs et Travailleuses de l’Economie Informelle

Occupant plus de 70% de l’activité économique du pays, les travailleurs et travailleuses de l’économie informelle jouent un rôle considérable dans la création des richesses nationales et des emplois. Toutefois, ce secteur ne bénéficie d’aucune assistance de la part des pouvoirs publics. A cet effet, nous demandons :

-         La généralisation de l’accès à la formation professionnelle aux travailleurs et travailleuses de l’économie informelle par la valorisation de leurs métiers.

-         L’appui en équipements et en locaux dans leurs activités quotidiennes

-         La protection sociale à cette catégorie de travailleurs

-         La création de mutuelles de santé appuyées par l’Etat en leur faveur.

-         La lutte contre le travail des enfants dans le secteur de l’économie informelle.

  1. 11.              Protection  et Préservation des richesses nationales :

       L’exploitation des richesses nationales, surtout minières, a atteint des degrés extravagants tant par la signature des autorisations de prospection, que des contrats de production, et tout ceci avec un impact très faible, sinon inexistant pour nos travailleurs et notre peuple.

   Nous exigeons ;

-         La Révision de tous les contrats miniers en cours avec l’implication de tous les partenaires sociaux et des populations riveraines des zones d’implantation.

-         L’ouverture de véritables écoles de formation sur les modules pointus relatifs à l’exploitation de certaines catégories de minerais pour former notre main d’œuvre nationale dans ce domaine.

-         Le respect de l’environnement par les Multinationales qui déversent tous les résidus de produits toxiques à ciel ouvert

-         La cartographie exacte et les typologies des maladies professionnelles dans les sites de production minière et la prise en charge totale des travailleurs dans la prévention et leur traitement.

 

  1. 12.              Situation des Travailleurs victimes des évènements de 1989/90/91.

 Le règlement de la situation des travailleurs victimes des déportations de 1989 ainsi que des purges de 1990/91, a été partiel et unilatéralement piloté par les pouvoirs publics et leurs agences. D’autre part, les conditions de retour  et de rétablissement dans leurs droits n’ont pas été complètes, de sorte que plusieurs contentieux liés à cette tragédie continuent de se poser, à cet effet, nous revendiquons ;

-         Une régularisation complète de la situation de tous les travailleurs tant des secteurs parapublic que privé (les dernières indemnisations n’ont pas bénéficié aux travailleurs des établissements parapublics comme l’Ex-OPT, la CNSS, la SOMELEC, etc)

-         Un règlement définitif de tous les contentieux par la restitution complète aux ayant-droits de tous leurs biens.

-         Une implication effective des victimes à tous les processus de règlement qui concernent leur situation.

-         L’achèvement du programme de retour des déportés tant du Sénégal que du Mali, à travers des discussions patriotiques avec les intéressés et tenant compte de leurs revendications légitimes.

 

  1. 13.              Situation des Mauritaniens vivant à l’étranger.

  Une véritable politique de valorisation des potentialités humaines, matérielles que renferme la diaspora mauritanienne, doit être menée. Ces compatriotes contribuent largement à la croissance intérieure de notre économie par des transferts considérables qu’ils effectuent dans le pays, et à cet effet, les pouvoirs publics doivent leur accorder :

-         La plénitude de leurs droits citoyens par une bonne organisation de leur enrôlement sur les fichiers d’état-civil national comme tous les autres mauritaniens. Le caractère discriminatoire et sélectif observé dans certains centres d’enrôlement, comme celui de la France, doit cesser définitivement.

-         Un accompagnement de leur réinsertion socioprofessionnelle, à travers une agence nationale spécialisée qui leur garantit des services de qualité et répondant à leurs aspirations personnelles ou collectives.

-         La facilitation des opérations de transfert qu’ils effectuent à travers des institutions bancaires, avec des taux incitateurs.

 

  1. 14.              Lutte contre la Pauvreté.

Les Cadres Stratégiques de Lutte contre la Pauvreté (CSLP 1 et 2) n’ont pas pu faire face efficacement à l’ampleur de la pauvreté dans le pays, pauvreté dont le taux moyen est de 50% mais qui atteint dans certaines régions le seuil de 70%. Il a été noté le manque d’implication des populations bénéficiaires dans les stratégies sectorielles. Les organisations syndicales n’ont pas elles aussi, été associées à ces programmes.

Nous exigeons :

-         Une véritable promotion d’une politique de développement économique et social qui profite à toutes les populations et leur implication effective dans les programmes qui les concernent.

-         Un investissement massif des ressources dans toutes les régions pour développer des projets porteurs et lutter résolument contre les inégalités sociales.

-         La promotion de l’agriculture et de l’élevage modernes pour soutenir une véritable croissance durable basée sur nos potentialités économiques.

 

  1. 15.              Lutte contre l’esclavage et les séquelles de l’esclavage:

  Il est inadmissible qu’au seuil du 21ème siècle, que notre pays continue à connaître des cas d’esclavage ou de séquelles de l’esclavage. A cet effet, une véritable promotion d’une politique hardie de lutte conséquente contre ces fléaux, doit être promue et elle passe par ;

-         La prévention des pratiques esclavagistes à travers des programmes de sensibilisation et d’information menés dans les médias publics, des panneaux publicitaires dénonçant ces pratiques, implantés dans toutes les villes et les campagnes et le long des routes, une refonte des programmes d’enseignement, à partir du primaire pour introduire des cursus sur l’égalité de tous les citoyens et la promotion des droits humains, économiques et sociaux.

Il est important et primordial de procéder à des recrutements de travailleurs et travailleuses sociaux qui vont animer et dérouler les campagnes et les programmes destinés à prévenir et lutter contre l’esclavage et ses séquelles. La parole doit être donnée aux victimes et aux associations ou organisations qui œuvrent dans la promotion d’une véritable culture de droits humains, économiques et sociaux dans une société égalitaire, démocratique, débarrassée de toutes les entraves à la cohésion sociale.

-         La protection des victimes de l’esclavage et des séquelles de l’esclavage, à travers des programmes de développement en leur faveur, des politiques volontaristes d’assistance publique pour leur accès à tous les services sociaux de base, le respect de la dignité humaine de tous les fils de la Nation par une lutte contre toutes les discriminations et les injustices, l’accès à la justice et l’assistance juridique des victimes pour préserver leurs droits fondamentaux,

-         L’indemnisation des victimes de l’esclavage et des séquelles de l’esclavage, par des mécanismes publics qui leur permettent de se prendre en charge individuellement et de se libérer des rapports esclavagistes de manière définitive.

-         L’implication des victimes dans le pilotage, l’exécution et le suivi des programmes de l’Agence de Lutte contre les séquelles de l’esclavage, doit se traduire dans un agenda de travail piloté par des mécanismes représentatifs de tous les acteurs sociaux qui s’engagent dans une dynamique de changements sociaux fondamentaux et irréversibles.

  1. Refonte du système éducatif.

La tenue des récents états généraux de l’Education nationale n’a pas apporté de véritables réponses à la crise profonde que connaît le système de l’éducation nationale. Un sursaut national doit prévaloir pour amener tous les citoyens et les acteurs du système, à mener des réflexions approfondies qui vont déboucher sur la tenue de véritables concertations nationales sue le système de l’éducation nationale en dehors de toutes pressions politicienne ou idéologique et qui tienne compte des aspirations légitimes de notre peuple dans toute sa diversité.

La nécessité d’adapter les contenus pédagogiques à la formation de ressources humaines de qualité pouvant répondre aux besoins de notre marché national de travail, doit être recherchée.

 

 

 

 

 

 

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021

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